Suite de notre série d’articles sur boire,manger avant, pendant l’effort. Dans le dernier article, nous avons vu que le protocole hydrique était la première chose à installer. Maintenant il est temps de passer à l’étape supérieure si votre effort dépasse 1H15 à 1H30. Il faut ramener des calories pour éviter l’hypoglycémie.
Une histoire de dépenses, apports...
Oui, vous êtes les trésoriers de votre capital énergétique. Votre réserve avec une recharge glucidique d’avant course et pour un athlète entrainé est estimé à 2000/2400kcal. C’est votre capital. Mais on a vu qu’il vous faut du carburant pour avancer. Chaque heure, vous dépensez des calories pour produire votre effort et vous en dépensez plus ou moins selon l’intensité de votre effort. Mais à trop dépenser sans avoir des apports, vous risquez la banqueroute ! Il vous faut donc des apports. Chaque élément que vous allez ingérer vous apportera ces calories. Mais avant de savoir comment vous allez faire vos apports, il est intéressant d’avoir d’abord une idée de vos dépenses pendant l’effort et cela dépend de deux grands paramètres : la nature de votre effort et de la masse à faire bouger (votre poids)
il y a une bonne base pour faire ce calcul : Selon Ainsworth et al. 2000 et ACSM, 2006 , et pour connaitre la nature de votre dépense vous multipliez le MET ( Metabolic Equivalent of Task) par votre poids avec la formule suivante
Dépense énergétique en Kcal/mn = (MET x 3,5 x votre poids en kg)/200
C'est quoi le MET ?
le MET (Metabolic Equivalent of Task) est une échelle qui permet de mesurer votre degré d’effort en fonction de votre activité. L’échelle va de 1 à plus de 10.
1 c’est la sédentarité : Assis, dormir, jouer au jeu vidéo.
Entre 1,5 et 3 c’est une dépense très légère – Promener le chien, c’est 2,5
De 3 à 6 une activité modérée comme une marche (4) footing léger (5) , un ultra trail ?
De 6 à 9, c’est une activité intense comme un footing (7), du VTT (8,5), un trail long ?
Au delà de 9 c’est une intensité très intense comme comme une compétition de 1H en courant (10), un trail très court ?
Donc on peut imaginer pour un footing (MET = 7) et un poids de 70kg, une dépense énergétique de :
(7x70X3,5)/200 soit 8,6kcal/mn soit 515 kcal/h.
Sans apport durant cet effort, et pour cet exemple, votre autonomie sur la filière glycogène serait de 4h/4H30 si l’on part d’un capital à 2000/2400kcal. Ensuite c’est l’hypoglycémie… le problème c’est qu’un trail long dure bien plus longtemps que 4H30.. Au moins le double…
Il faut donc alimenter votre compte !
Vous allez donc devoir alimenter votre corps si vous voulez poursuivre au delà ! Si vous estimez votre temps de course autour de 8H, avec ce niveau d’effort (7) et ce poids, il vous faudra 4120 kcal pour fournir cet effort. vous avez donc à minima 2000 Kcal à apporter durant tout votre effort soit 250Kcal/h ! Ce n’est pas rien ! Une pom’pote Andros de 90g, c’est 52kcal !
Le sucre, le glycogène est le carburant le plus vite assimilable par votre organisme et sera votre premier carburant. C’est aussi le plus efficace pour avancer.
Nous savons que le corps assimile à peu près 1g de glucides par min (soit 60g par H) et pour chaque gramme de glucides que nous absorbons, il y a 4 Kcal (et 9kcal pour 1g de lipide) . Cela reste théorique, certains peuvent assimiler beaucoup plus, d’autres non . Mais vous avez la base pour faire vos calculs. Vous pouvez donc apportez avec 60g de glucides => 240kcal. On tient à peine la demande de notre exemple (250kcal). Nous avons fait le choix de l’approche calorique par cette formule MET. Mais votre consommation par heure peut être faite de différentes autres manières mais on retombe souvent sur les mêmes fourchettes d’apports. Une autre méthode pour calculer ses apports est de vous fixer comme objectif 1g de glucide par kilo de poids de corps.
Apports solubles ou solides ?
Pour faire vos apports, il ya deux possibilités : via une boisson isotonique ou par des aliments à ingérer. La première semble être la plus digeste et une solution qui nous permet de « mieux assimiler les apports ». La seconde semble plus variée (possibilité de prendre plus d’aliments différents, compotes, barres etc) cependant elle est plus risquée.
Il faut savoir que pendant un effort, l’afflux sanguin est dirigé vers les muscles sollicités plutôt que vers le système digestif, donc il est beaucoup plus compliqué d’avoir une bonne et rapide digestion. L’intestin étant moins irrigué, il ne fonctionne pas de façon optimal.
Les à-coups, (l’effet mécanique de la foulée) que provoque la course à pied entraine également une potentielle hypersensibilité de l’intestin. Un organe qui s’adapte très difficilement à l’effort endurance.
Il est donc nécessaire de prendre en compte les avantages et inconvénients des deux possibilités et de jongler entre ces deux systèmes pour éviter l’écœurement ou le désordre gastrique. Le mixte des stratégies est intéressant en ne perdant pas de vue qu’à la fin de chaque heure, il vous faudrait l’apport recommandé entre ce que vous buvez en boisson isotonique et ce que vous mangez.
Quelle est votre capacité d'absorption ?
Si on parle apports par les glucides, la théorie nous dirait de consommer entre 40 et 80g par H (X4 = 160/320kcal/h)- Pourtant certains arrivent à peine à consommer 30g/H et d’autres 90g/h. Nous sommes assez inégaux dans ce domaine. Mais comme pour l’apport hydrique, vous pouvez/devez entraîner votre corps à manger et assimiler des aliments pendant l’effort et sur ces doses. Plus vous vous entrainerez chez vous, pendant vos sorties, à manger pendant vos séances, plus votre corps sera capable de bien assimiler ce que vous lui donnez. Or souvent à l’entraînement on sous-dimensionne les apports. Toutefois soyons clairs, assimiler 90g/h (soit 360 kcal/h ) est tout même très compliqué. Mais n’hésitez pas à pousser ou trouver votre limite à l’entraînement pour réguler ensuite en compétition et ne pas passer du mauvais côté
L'alternance comme clé ?
Buvez la boisson isotonique par petites gorgées. Alternez avec des gorgées d’eau plate et des apports solides. Diluez ces derniers avec de l’eau plate et non de la boisson isotonique. Votre jeu sera de naviguer d’un apport à l’autre au fil de votre course.
N’attendez pas d’avoir faim ou soif pour commencer à manger, l’idéal serait de commencer à 45’ du début de course et d’avoir ensuite un apport régulier en petite quantité. Cela permettra de réduire les soucis digestifs et d’avoir un taux de glycémie plutôt stable (si vous ne vous goinfrez pas de bonbons ou coca bien sur)
Vous pouvez utiliser des barres, compotes, gommes, gels, boisson iso, etc etc .. l’essentiel est que vous utilisiez des produits validés en amont à l’entrainement
Prenez également en compte le facteur météo, quand il fait très chaud vous aurez de plus en plus de mal à ingérer votre boisson iso au gout très sucré par exemple. Idem pour vos compotes ou vos gels, il faudra donc adapter vos apports de façon à ne pas tomber dans l’écœurement sachant que par ailleurs vous buvez plus pour refroidir votre corps !
Privilégiez donc des apports au gouts « neutre » ou salés. Il faut éviter la « monotonie alimentaire » surtout si vous faites de l’ultra.
D’ailleurs en parlant d’ultra, vous devriez au bout de plusieurs heures, penser à amener en plus de vos apports glucidiques, des protéines et des lipides.. C’est là que rentre l’option sandwich, purée, avocat, etc.
Il n’y a pas de recettes magiques.. l’essentiel est bien de tester vos protocoles alimentaires et hydratation en amont, de respecter l’idée d’avoir un apport régulier entre boissons et apports solides. Et surtout de connaitre votre « capacité maximale » d’absorption.
Enfin n’écoutez pas les copains. Ce qui marche pour eux ne marchera peut être pas pour vous 😉