Il y a un an, j’étais au départ de l’UTMB… comme coureur, traileur à l’assaut de ce tour mythique. Le truc que je voulais accroché à mon Endurance collection
Depuis 1 an, je ressasse cet arrêt à Fouly, cet abandon… Je rumine, je digère… Cet arrêt a marqué la fin d’une histoire. L’ultra trail ne veut pas de moi. C’est cruel et l’accepter est un processus long… car je veux encore être dans la montagne, vivre des défis extraordinaires, avoir les yeux qui brillent. Alors comment faire ?
Quelques mois avant, le vélo en mode gravel & bike packing a commencé à me faire de l’oeil… Plus tolérant avec les soucis gastriques, cette pratique garde cette philosophie du voyage, de l’acte sportif gratuit et renouvelle même mon champ des possibles. Je tatonne, j’avance et surtout je m’y retrouve. Cette année, j’ai retrouvé du plaisir et cocher quelques lignes de ma liste ” à faire” => Paris Roubaix / Traversée des Vosges & Jura/ 100 cols
Alors en cette fin d’année, parce que de nombreux athlètes Fartleck sont au départ d’une des courses de l’UTMB, parce que j’ai un compte à régler avec ce tour du Mont Blanc, je me suis combiné ce petit tour.
Mercredi => Je traverse la France en camion. Je débarque au Cornet de Roselend pour supporter les coureurs de la TDS. Les passages s’enchainent, l’orage et la pluie débarquent…
Jeudi => Je me réveille seul au monde… ou presque. Le camion du laitier récolte la production de l’alpage. Plus de voitures d’assistance, plus de coureurs, seul quelques bouts de papiers énergétiques marquent la passage de l’épreuve. Il fait beau, à moi de jouer. Je pose le fourgon à Beaufort puis remonte ce col. 20 kil pour démarrer et me retrouver 3h plus tard au même endroit qu’au réveil… C’est quand l’aventure ? Dès la bascule ! Passé le Cornet je rentre en terra incognita. Je découvre pour la première fois les Chapieux de jour. 😉 Je croise aussi en l’espace de 5′ sur le bord de la route, 2 binômes de traileurs, qui poursuivent (ou finissent) leur TDS seul, sans dossard, à la dérive. Comme un éclair, je me rends compte que l’aventure est là où on veut la mettre. Jamais, je n’ai imaginé que l’on pouvait poursuivre une course là où on l’avait abandonné la veille. Il y a du panache dans cette idée. J’adore. Passé Bourg Saint Maurice et sa circulation pesante, je retrouve des routes agréables pour monter le Petit Saint Bernard – 27 kilomètres pour monter. Pourquoi on l’appelle le petit ? Le paysage est fantastique. Les marmottes me sifflent. Je suis bien là. Descente sur Courmayeur très chouette puis retour dans une vallée… Fin du spectacle
Vendredi => Je me réveille à 6h avec un coup de flip. Je prends la mesure de ce périple. Aujourd’hui j’ai 150kil et 4500 D+ à faire. Je suis seul avec mon vélo. La pluie est annoncée en fin de journée. L’angoisse de me retrouver à l’étranger, dans un traffic routier dense et sur des routes inconnues commencent à me faire douter. Je n’attends pas le départ de la CCC. Je l’anticipe de 1h15. Seul quelques coureurs sont déjà en poste et attendent fébrilement. A chacun son aventure autour de ce Mont Blanc. J’avais anticipé cette trace en essayant d’éviter au maximum cette vallée qui file vers Aoste et qui me semble bien autoroutière. Bonne pioche. Pendant 2 heures je fais l’un des plus beaux tronçons de ce parcours entre Avise et Gignod par la SR 41. Ensuite je retrouve la montée vers le Grand Saint Bernard. Le vent est de face et çà se complique sur la partie sommitale. Je finis dans une purée de pois mais je ne me doute pas ce qui m’attend côté Suisse. Dès les premiers mètres de la descente, je suis sous la pluie. J’insiste en me disant que je vais vite passer cette zone nuageuse… erreur. En 4 kilomètres, je suis frigorifié – Trempé. Je me mets à l’abri sous un tunnel et superpose les couches. La descente vers Orsières se fait sous de longs pare-avalanches. Un luxe quand il pleut. Je me réchauffe tranquillement mais retrouve la pluie dans la montée de Champex Lac. J’arrive avant les coureurs, fait le plein dans une supérette et file sans voir la tête de course. On observera tout çà de Trient, fin de mon étape. La fin de journée est laborieuse mais plus clémente. Encore un bel itinéraire bis au pied du col de Forclaz en passant par les Vignes de Martigny. J’arrive à Trient en même temps que la tête de course de la CCC. La soirée va être sympa à voir les coureurs passés. Eux aussi en bavent et la nuit s’annoncent difficiles. A ce moment je suis content de mon sort et de mon modèle de pratique sportive embourgeoisée 😉
Samedi => Déjà le dernier tronçon. Le dilemme… Attendre 3h à Trient pour la tête de la course UTMB ou filer à Chamonix encourager Pascale qui doit lutter pour finir la CCC dans le timing. J’enfourche le vélo. le Col des Montets est facile. Descente et un plaisir à voir les derniers concurrents de la CCC qui finissent au bout de 26h avec leur course. Des visages, des sourires… Le pourquoi du comment on croit le comprendre là... à quelques centaines de mètres de l’arrivée. Le bonheur a quand même des visages. Pascale arrive. Je file. Reste à retrouver Beaufort en passant par les Houches et Saint Gervais désertés par les traileurs. 12h auparavant c’était l’effervescence… Col de Megève et un réel plaisir à trouver des routes tranquilles sur le col des Saisies. Je descend à Hauteluce puis rentre à Beaufort. Je hurle un cri de joie dans cette descente. Je suis content de moi. J’ai comme réglé un compte avec moi-même avec un lieu… Je suis (presque) apaisé